Catabase, 2023

Claire Amiot

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Claire Amiot, «Catabase», 2023, Draps peints avec des végétaux (noix de galle de chêne et millepertuis) et satins de polyester peints avec des pigments synthétiques, Les Ateliers de la Ville en Bois, Nantes, france, Gros plan
Claire Amiot, «Catabase», 2023, Draps peints avec des végétaux (noix de galle de chêne et millepertuis) et satins de polyester peints avec des pigments synthétiques, Les Ateliers de la Ville en Bois, Nantes, France, Gros plan
Claire Amiot, «Catabase», 2023, Draps peints avec des végétaux (noix de galle de chêne et millepertuis) et satins de polyester peints avec des pigments synthétiques, Les Ateliers de la Ville en Bois, Nantes, France
Claire Amiot, «Catabase», 2023, Draps peints avec des végétaux (noix de galle de chêne et millepertuis) et satins de polyester peints avec des pigments synthétiques, Les Ateliers de la Ville en Bois, Nantes, France, Gros plan
Claire Amiot, «Catabase», 2023, Draps peints avec des végétaux (noix de galle de chêne et millepertuis) et satins de polyester peints avec des pigments synthétiques, Les Ateliers de la Ville en Bois, Nantes, France
Claire Amiot, «Catabase», 2023, Draps peints avec des végétaux (noix de galle de chêne et millepertuis) et satins de polyester peints avec des pigments synthétiques, Quatre, Grand Huit, Nantes, France

Catabase, 2023

Draps peints avec des végétaux (noix de galle de chêne et millepertuis) et satins de polyester peints avec des pigments synthétiques 6.50 × 10.50 m Les Ateliers de la Ville en Bois Nantes, France

« C’est dans l’idée de paysage, et ses reconfigurations au prisme de l’art textile, que la pratique de Claire Amiot trouve l’un de ses fondements. Les œuvres qu’elle conçoit ont trait aux états émotionnels dérivés du contact avec la nature ; l’évocation du grandiose y côtoie celle de l’infime, le détail précaire – empreintes et tâches, pigments et résidus – y atteste la solidité de l’émotion et s’offre comme clef de voûte d’un rapport sensible au monde. La matière du paysage, l’action de la marée ou de la rosée, les couleurs extraites des végétaux, sont mis à contribution comme autant d’ingrédients picturaux, – la substance même de l’œuvre en est extraite. À l’issue de ce processus, largement modelé par un hasard que l’artiste favorise afin d’y mieux reconnaître la nécessité de son propre geste créatif, l’œuvre-paysage, déployée dans l’espace et arpentée par le spectateur, se substitue à la réalité initialement entrevue, au paysage premier d’où a surgi l’émotion. Elle en conserve néanmoins l’empreinte, à la manière d’un palimpseste, ou plutôt d’un tataki zomé, technique japonaise d’impression végétale avec laquelle s’est familiarisée Claire Amiot.

Catabase (la descente aux enfers dans le mythe grec, à la fois épreuve d’initiation et acte de transgression) met en jeu cette même logique du paysage, dont elle renouvelle parallèlement les codes. Car ici tout se joue en hauteur, comme pour mieux indiquer à ceux qui s’avancent dans l’espace d’exposition que la descente a déjà eu lieu, que c’est depuis les régions infernales qu’ils envisagent le point de départ de leur voyage, et l’éventualité d’un retour. La question se pose alors de savoir où est l’œuvre : s’agit-il du ciel fluide tendu en travers de la pièce, et qui voit se juxtaposer teintures végétales et pigments synthétiques, ou bien faut-il la trouver dans l’en-deçà vide où se dépose la lumière venue du monde extérieur, dans le foyer souterrain où convergent ses rayons ? Cette tension constitutive se reflète dans le choix des matériaux et les techniques employées, dessinant une esthétique hybride, où l’artifice voisine avec le naturel, la sobriété avec l’éclat. Par le contraste, par la juxtaposition, une profondeur est suscitée qui se joue de la surface obstinément plane : ce que l’artiste se refuse d’accomplir en usant des effets de volumes, des plis et des drapés, elle trouve à l’exprimer dans la mise en relation de formes et de couleurs qui paraissent issues de systèmes, de cadres antagonistes. Des mondes entiers semblent s’entrechoquer dans ce vaste tableau qui tient du vitrail autant que de la voûte, du rêve aussi bien que de la mémoire – un firmament intérieur tendu d’un point à un autre du temps. À nous maintenant d’y lire, comme dans une carte ésotérique, le trajet de notre retour parmi les vivants ».

Xavier Le Brun