Egyptiennes, 2003

Jean-Michel Delage

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Jean-Michel Delage, «Egyptiennes», 2003, photographie : droits réservés
Jean-Michel Delage, «Egyptiennes», 2003, photographie : droits réservés
Jean-Michel Delage, «Egyptiennes», 2003, photographie : droits réservés
Jean-Michel Delage, «Egyptiennes», 2003, photographie : droits réservés
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Jean-Michel Delage, «Egyptiennes», 2003, photographie : droits réservés

Egyptiennes, 2003

Au cours d’un voyage en Égypte, j’ai remarqué ces bâches recouvrant des voitures en stationnement. Trouvant le phénomène trop récurrent pour ne pas être cocasse, j’en photographiai quelques-unes. À mon retour en France, j’ai découvert mes images sur la table lumineuse. J’ai alors jubilé : Ces voitures bâchées, une fois enfermées dans le rectangle de la photo, prenaient une dimension que je n’avais pas pressentie lorsque je les avais vues pour la première fois. Elles avaient pris une signification qui leur était propre, dans un cadre plus épuré. Elles devenaient des personnages drapés de couleurs, de vie, d’humour, d’histoire et d’histoires.
Les bâches, utilisées pour protéger de la poussière, des éraflures, et même du regard des autres, sont chacune unique, fabriquées dans des tissus aux couleurs et aux motifs divers. Au fil du temps, l’usure oblige les propriétaires à les rapiécer, qui créent parfois de véritables patchworks. Affublée de son voile, la voiture quitte son rôle, elle n’est plus « l’objet de grande consommation », ni la simple illustration de la « vie moderne ». Elle se départit de son caractère masculin, ne porte plus les lourds devoirs de puissance ou de richesse que son propriétaire lui impose d’ordinaire. Ici, dissimulée sous sa toile personnalisée, elle devient ludique, séduisante, féminine et a soudain l’autorisation d’être témoin du temps qui passe. Sur les trottoirs d’Egypte, on vend toutes sortes de choses, des journaux, des livres, des bibelots et aussi, de chatoyants foulards. Si les femmes, musulmanes, sont traditionnelles, il leur reste une fantaisie à s’offrir, une mode à suivre, celle du foulard bigarré, le fleuri, le léopard, le rayé, l’uni… Le rapprochement est simple à faire, et pour moi, il est évident même si les démarches respectives sont inconscientes. Et quand on veut faire le portrait intime d’une femme, on choisit de la photographier dans son endroit préféré, avec les objets qui parleront pour elles et avec elles`. Les voitures bâchées appartiennent aux rues turbulentes des villes, à leurs marchés impromptus, aux scènes insolites qui s’y déroulent, à leurs décors de théâtres délabrés. La voiture y est une actrice parée, dont la robe et la scène accompagnent l’identité. Une harmonie s’installe, née de l’alliance du modèle et de sa toile avec les petits détails de la vie frénétique de la rue.
Aussi je photographie la voiture bâchée ayant un sens dans sa ville. J’évite de l’isoler de son cadre. Je veux jouer avec le fond, l’environnement, le hasard. Sans le vouloir, et sans le savoir, les propriétaires de ces véhicules couverts pratiquent une forme d’art urbain, un art brut et spontané. J’ai envie de me faire simple témoin de leur œuvre, de montrer une Egypte simple et rieuse, la vie colorée et artistique de la rue au travers de ces voitures insolites dont on ignore la marque et la carrosserie.