Le Chanteur

Eva Gerson

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Eva Gerson, «Le Chanteur», photographie : droits réservés

Le Chanteur

Durée: 03’25

Vidéo diffusée sur un moniteur 16/9

Le chanteur,

C’est trop tôt un matin qu’il décide de réinventer l’asphyxie. Réveillé par une toux mi-molle mi-sèche. Et une étrange mousson nantaise.

Inspiration

Il est vraiment nu. La cigarette en boucheil s’approche de la chose endormie. Elle est incapable de fermer sa bouche. Même quand elle dort sa bouche reste entrouverte. Cette bouche. Cette bouche parfois il rêve de la coudre, métaphoriquement bien sûr.

Expiration

Bien sûr.

Il crache sa fumée dans la chose inconsciente. Il le fait plusieurs fois, entièrement.

Les strangulations en jouissance l’ont trop ennuyé. Cela ne lui suffit plus. Tous les soirs, dans le même lit, la même pipe, et la cadence commence. La pénétration arbitraire, la chose adore. Après il commence à serrer son cou, à chaque fois un peu plus fort. Il s’arrête après le pincement.
Aspiration
Il l’adore. Elle dort encore. Elle est habillée
avec sa robe de la veille, elle a même gardé ses chaussures. Il ne sait pas où elle est allée, si elle a parlé avec des hommes, des hommes ni combien. Il lui retire ses chaussures, caresse sa jambe pleine de bleus de sa maladresse.

Inspiration
Expiration

Il pose sa main qui pue le tabac sur sa bouche, cinq secondes. Il souffle délicatement dans sa bouche. Quatre secondes. Il recommence. Ça l’excite terriblement. Dix secondes. Elle ne se réveille même pas. Quinze secondes. Vingt secondes.

Inspiration
Trente secondes

Il s’arrête pour reprendre son souffle. L’air.
Il sait qu’il ne peut recracher l’air qu’il a déjà consommé CO2 fou. Il gonfle ses joues, quarante secondes, pour qu’elle puisse continuer de respirer. Il peut aspirer pendant plus d’une minute et expirer de la même façon, même plus.

Aspiration
Inspiration
Expiration

Une chose devient abstraite. Le reste des gens qu’il entend respirer seul, quel ennui. L’appartement où il la maintient en vie paraît vide, leur chambre transpirante et le rouge bouge. Il se met sur elle, et souffle qu’il devrait davantage veiller au liquide et degré qu’elle avale.

Quand il ne lui donne pas l’air il bouche sa bouche. Cinquante secondes.
On dirait qu’elle rêve, il retire sa main pour embrasser la dormeuse. Doucement, elle semble revenir dans le monde des éveillés des respirants. Il se remet à côté d’elle pour de nouveau la faire respirer ou l’étouffer selon.

Elle ouvre les yeux étonnée partout. Il oppose une résistance amoureuse. Elle se rendort.

Inspiration
Quarante secondes.

Il la lâche et dépose ses mains devenues moites sur son long cou, sublime.
L’air peut rentrer en elle, quand il le décide.