» Les toutes premières pellicules s’appelaient d’ailleurs « films flammes» à cause de leur facilité à s’enflammer. Les Disparus du super 8 enregistrent ce moment où la machine s’arrête et le film se consume. Si la dynamique du film est rompue, un autre mouvement apparaît, plus autonome et plus inquiétant, celui de la matière qui s’émancipe et vient défigurer les visages, lécher les corps, déchirer les espaces, révéler des figures monstrueuses. Les Disparus du super 8 rejoignent la ronde de nuit des créatures étranges – freaks, vampires, nains, géants et autres fantômes – qui peuplent le cinéma et nos terreurs d’enfant. Il marque également un moment de rupture dans la trajectoire de Froger qui matérialise ainsi son abandon d’un médium particulier : le super-8, la pellicule des familles, rejoint la liste des matériaux en voie de disparition. »
Claire Guézengar
» Je vois Les Disparus : phrase impossible, ou irréalisable; phrase imprononçable en vérité. Je vois les restes de l’image dans l’image: ce qui reste de l’image, c’est à dire l’étendue d’un monde qui s’est calciné dans son aspiration à être contenu en elle. Ou de ce qui parfois, mis à distance, y fut retenu.
Je vois le geste de Froger : brûler l’image, jusqu’à ce que ses boursouflures soient visibles. Brûler l’image qui s’animait pour la figer. Rendre visible les boursouflures de l’image : ses blessures, ses plaies violacées, comme celles d’un corps maltraité. En cela elles sont aussi, ces images, érotiques et douloureuses. Comme si l’intimité irreprésentable d’un coït accablant devenait visible précisément là où l’image est aveugle, ou s’aveugle : là où l’image se noie. »
Luis Pérez Oramas