Résolution des forces en présence, 2014

Vincent Mauger

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Vincent Mauger, «Résolution des forces en présence», 2014, photographie : A-M Tricoire
Vincent Mauger, «Résolution des forces en présence», 2014, photographie : A-M Tricoire
Vincent Mauger, «Résolution des forces en présence», 2014, photographie : A-M Tricoire
Vincent Mauger, «Résolution des forces en présence», 2014, photographie : A-M Tricoire
Vincent Mauger, «Résolution des forces en présence», 2014, photographie : A-M Tricoire
Vincent Mauger, «Résolution des forces en présence», 2014, photographie : A-M Tricoire
Vincent Mauger, «Résolution des forces en présence», 2014, photographie : A-M Tricoire
Vincent Mauger, «Résolution des forces en présence», 2014, photographie : A-M Tricoire
Vincent Mauger, «Résolution des forces en présence», 2014, photographie : A-M Tricoire
vincent Mauger, «Résolution des forces en présence», 2014
Vincent Mauger, «Résolution des forces en présence», 2014, photographie : A-M Tricoire
Vincent Mauger, «Résolution des forces en présence», 2014, Voyage à Nantes, Place du Bouffay

Résolution des forces en présence, 2014

Voyage à Nantes Place du Bouffay commissariat Jean Blaise et David Moinard

 

Toutes piques dehors

Un porc-épic aérodynamique, une massue barbare, un arbre piquant abattu par les vents ? La redoutable sculpture que le jeune Vincent Mauger a posée sur la place du Bouffay laisse libre cours à toutes les interprétations.

Elle est tombée comme une masse d’arme médiévale sur l’élégante place du Bouffay de Nantes : avec une grâce sans appel, tous pics dehors. L’énorme sculpture posée là par Vincent Mauger frappe d’abord par son agressivité quasi animale : autour d’une colonne vertébrale métallique prise dans un mouvement de torsion, s’hérissent de longues pales de bois à la pointe terrible. Archaïque, vraiment. Mais plus on contourne la bête, plus elle dévoile sa beauté ultra-graphique, ses jeux d’équilibre savants. Sensation d’abord d’un objet qui s’ébouriffe, clame son refus qu’on l’approche. Puis, au fur et à mesure de la déambulation autour de la magistrale ronde bosse, mille images surgissent : les lances de bois composent comme un jeu de pales d’avion, ou l’épine dorsale d’un poisson venimeux saisi dans sa course, ou encore l’envol d’oiseaux tels que les saisissait le pionnier de la chronophotographie, Edward Muybridge.

Elles évoquent la recherche d’un scientifique un peu poète, ou un éventail géant gonflé par les vents de l’estuaire. A la lumière de l’aube ou dans les feux de la nuit, selon que l’on soit patient ou pressé, l’œuvre évolue à chaque instant. D’où son titre, peut-être : Résolution des forces en présence. « Mon idée de départ a simplement été de rêver à une fabrication archaïque qui combine le bois et le métal, en un contact rustique », raconte le jeune artiste dont l’on peine à capter la voix timide, en contraste parfait avec sa pièce qui bouscule sans barguigner la ville. « Cet objet télescope différents univers : il a le caractère barbare d’une machinerie archaïque, mais peut apparaître aussi comme un arbre couché, ou un animal à l’affut. J’aime qu’on ait un rapport très physique à lui, qu’il nous domine et impose le respect. En marchant tout autour, la vision qu’on en a change : j’ai essayé de créer un véritable effet cinétique, pour qu’on ait du mal à appréhender la forme dans sa globalité ».

Evidente quand on la découvre, l’œuvre s’est avérée d’une fabrication si complexe que tous, de l’artiste aux organisateurs de l’événement, ont failli abandonner l’idée. C’était sans compter sur l’entreprise de luminaires de la région chargée de la fabrication de son noyau central. « Ils se sont complètement emparés du projet, ont trouvé le bureau d’étude qui a su résoudre toutes les contraintes mécaniques et ont résolu tous les problèmes », se réjouit Mauger. Il n’en est pourtant pas à son coup d’essai : il a déjà posé dans une clairière lorraine, dans le cadre du Vent des forêts, une sorte d’énorme bactérie qui darde de tous ses rayons vers l’innocent promeneur ; lors de la Fiac de 2012, le jardin des Tuileries a aussi accueilli une sculpture de métal qui trompait méchamment l’œil. « C’est cette installation parisienne qui m’a poussé à imaginer des œuvres en espace urbain, alors qu’auparavant j’intervenais surtout dans un contexte rural, explique-t-il.J’aimerais que la sculpture remodèle la place, qu’à côté d’elle les bâtiments apparaissent comme des modèles réduits ».

L’artiste connaît bien Nantes : il y a passé son post-diplôme à l’école des Beaux-arts en 2003, y a réalisé une magnifique exposition au Lieu unique en 2009, et il habite toujours non loin de là. C’est pourquoi il serait particulièrement heureux que cette œuvre, conçue pour être pérenne, prolonge sa vie nantaise au-delà de l’été. Des pourparlers sont en cours avec les Monuments historiques, autour d’un lieu tenu secret, qui s’avèrerait idéal. Pour la ville et pour l’artiste, croisons les doigts.

Emmanuelle Lequeux